Christophe NAEGELEN

Question n°2782 – Démarchage téléphonique abusif et Bloctel

Question :

M. Christophe Naegelen appelle l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur un phénomène généralisé et national : le démarchage téléphonique devenu abusif et insupportable pour nombre de Français. Voté le 17 mars 2014 dans le cadre de la loi Hamon sur la consommation, le service Bloctel a ouvert le 1er juin 2016 par arrêté ministériel en désignant une société comme organisme chargé de gérer la liste d’opposition au démarchage téléphonique. La délégation de service public dure cinq ans jusqu’en 2021 et prévoit que cette société décide ou non de transférer la réclamation à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l’économie. En 2017, malgré l’inscription de plusieurs millions de français à Bloctel, le démarchage téléphonique reste massif. Cette société ne rend pas le service prévu dans la délégation de service public. Elle fait même le contraire de ce que pourquoi il a été désigné. Une entreprise de télémarketing co-gérante de cette société aurait même fourni aux démarcheurs les données personnelles des trois millions de français inscrits sur Bloctel. Si ce fait était avéré, il serait du ressort de la CNIL, qui surveille la protection des données et leur absence de revente ou réutilisation, de prendre toutes les mesures qui s’imposent. Aussi, un an après la mise en place de Bloctel, une enquête du magazine 60 millions de consommateurs révélait que près de la moitié des personnes inscrites ne percevaient aucune diminution du nombre d’appels. De plus, comparé au nombre incommensurable d’appels intempestifs des plateformes de téléphonie, le nombre des sanctions découlant de ce service Bloctel est tout à fait négligeable. Le système se révèle donc totalement inefficace. M. le député demande à M. le ministre si un audit ou une évaluation de son fonctionnement et de son effectivité a été menée par l’administration ou le ministère. De plus, les renseignements à fournir pour dénoncer un démarchage abusif sont beaucoup trop complexes. Les désagréments de cette situation qui empire de mois en mois sont nombreux : dérangements, surtout aux heures des repas, suppression quotidienne des messages d’appel en absence, obligation de filtrer les appels entrants, etc. Les personnes les plus exposées à ces appels intempestifs et renouvelés quotidiennement sont souvent les personnes les plus fragiles et vulnérables, notamment les personnes âgées ou malades, sans oublier celles qui, travaillant de nuit, dorment la journée. Il lui demande donc de simplifier la procédure et d’encadrer cette activité et ses dérives. Il est du devoir des pouvoirs publics d’agir efficacement face à une pression devenue insupportable pour certains Français. Il l’interroge donc sur les mesures que le Gouvernement entend prendre afin d’améliorer ce système très largement perfectible puisqu’inefficace.

Réponse

C’est dans le souci de protéger les consommateurs, notamment les plus fragiles, d’un démarchage téléphonique intempestif et intrusif, que l’article L. 223-1 du code de la consommation, issu de l’article 9 de la loi no 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, interdit à un professionnel, sous peine de sanction administrative (amende de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale), de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique, intitulée « BLOCTEL ». Conformément aux articles L. 223-1 à L. 223-7 et R. 223-1 à R. 223-8 du code de la consommation ainsi qu’aux exigences contenues dans le contrat de délégation de service public et dans ses annexes, la société OPPOSETEL gère la liste d’opposition au démarchage téléphonique. Elle exerce ainsi sa mission sous le contrôle de l’autorité délégante, à savoir la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) représentant le ministre de l’économie et des finances. L’existence de cette délégation de service public conduit nécessairement à un contrôle régulier de ce service de l’Etat sur la gestion du dispositif « BLOCTEL » par la société délégataire OPPOSETEL. A cet égard, aucun manquement à ses obligations légales n’a, jusque-là, été relevé à l’encontre de la société OPPOSETEL. A ce jour, la société OPPOSETEL a traité plus de 100 000 fichiers clients, correspondant à plus de 62 milliards de numéros de téléphone et 2 milliards d’appels sur les téléphones des inscrits sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique ont pu ainsi être évités. Cependant, plusieurs éléments démontrent que le dispositif n’est pas pleinement respecté à ce jour. Environ 700 entreprises ont adhéré au nouveau dispositif afin de faire retirer de leurs fichiers de prospection les numéros protégés par « BLOCTEL », ce qui semble très en deçà du nombre de professionnels tenus de recourir à ce dispositif préalablement à leur campagne de démarchage téléphonique. En parallèle, depuis fin 2016, à partir des signalements déposés par les consommateurs sur le site « BLOCTEL », la DGCCRF a diligenté de nombreux contrôles d’entreprises suspectées de ne pas respecter les dispositions légales précitées. A l’issue de ces enquêtes, des poursuites pour non-respect du dispositif « BLOCTEL » ont été engagées. Les entreprises identifiées se sont vues infliger une amende atteignant, pour les manquements les plus importants, le plafond de 75 000 euros. Les signalements déposés par les consommateurs, via le formulaire en ligne sur www.bloctel.gouv.fr ou par courrier, sont essentiels à la poursuite des investigations menées par les services de la concurrence, consommation et répression des fraudes. C’est pourquoi, il est demandé aux consommateurs d’être particulièrement vigilants, lors de la réception d’un appel litigieux, sur le numéro appelant, l’horaire et la date de l’appel, ainsi qu’à l’égard du discours tenu par l’interlocuteur, s’agissant notamment des éléments permettant l’identification de la société appelante. En tout état de cause, les agents de la DGCCRF poursuivront leur action de contrôle en vue de s’assurer du respect par les professionnels ayant recours au démarchage téléphonique de leurs obligations légales qu’aujourd’hui ils ne peuvent plus ignorer.

https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-2782QE.htm