Christophe NAEGELEN

Question n°22559 – Déchets recyclables exportés hors de France

Question :

M. Christophe Naegelen attire l’attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la question des déchets recyclables exportés hors de France. Depuis plusieurs mois, plusieurs États d’Asie du sud-est renvoient les conteneurs de déchets à leurs expéditeurs. Après la Chine en janvier 2018, ce sont plus récemment la Malaisie, les Philippines ou encore l’Indonésie qui ferment à leur tour leurs frontières en refusant de les accueillir. Bien que le marché mondial du recyclage soit légal, le sujet, d’un point de vue pragmatique et éthique, interpelle. La croissance verte dans laquelle on est engagé ne devrait pas permettre qu’un emballage en carton ou une bouteille d’eau jetée par un usager français puissent se retrouver à 16 000 kilomètres de l’Hexagone. Le dispositif de traitement des déchets dans la plupart de ces pays, ne permet pas à ces détritus d’être recyclés, traités ou incinérés. Ils sont souvent jetés dans la nature, stockés dans des décharges avant de venir polluer les océans. Les conséquences sont multiples, elles touchent les populations locales, entraînent une pollution de l’air et des cours d’eau, et provoquent sur place un désastre écologique et sanitaire. Dans un contexte accru de lutte contre le gaspillage, de préservation des ressources et pour le développement de notre propre filière de recyclage, il l’interroge sur l’opportunité d’intégrer ces déchets, en lien avec les industriels, dans un cycle vertueux de traitement des déchets via un programme ambitieux de recyclage générateur d’emplois.

Réponse

Le Gouvernement est extrêmement préoccupé par la situation des exports de déchets qui fait l’objet de conventions internationales permettant de réguler ces transferts. La convention de Bâle, adoptée le 22 mars 1989 et entrée en vigueur le 5 mai 1992, encadre et limite ces mouvements. Elle appelle les 184 Parties à observer les principes fondamentaux tels que la proximité de l’élimination des déchets, leur gestion écologiquement rationnelle, la priorité à la valorisation, le consentement préalable en connaissance de cause à l’importation de substances potentiellement dangereuses. En Europe, le règlement du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets met en œuvre les dispositions de la convention de Bâle. Au niveau national, le plan d’inspection national des transferts transfrontaliers de déchets, met en œuvre l’obligation d’établir un plan relatif aux transferts de déchets, prévue à l’article 50 du règlement du 14 juin 2016. Ce plan vise à structurer l’action des corps de contrôle engagés dans la lutte contre les trafics illégaux et à renforcer la coordination de leur action pour la rendre plus efficace. Concernant plus particulièrement la décision prise par certains pays asiatiques de renforcer le contrôle de qualité des déchets reçus sur leurs territoires, le Gouvernement suit avec la plus grande attention les annonces faites par ces pays de retourner des conteneurs de déchets non valorisables aux pays d’origine. Lors la 14ème conférence des parties à la convention de Bâle au premier semestre 2019, la France, la Norvège et l’ensemble de l’Union européenne ont proposé de modifier cette convention afin de renforcer le contrôle des transferts de déchets plastiques. Il s’agissait notamment de restreindre l’export de ces déchets vers des pays qui ne sont pas en mesure de les recycler. Dans ce cadre, le 10 mai dernier, un large consensus a été trouvé pour une modification en ce sens et plus de 180 pays ont décidé de renforcer la réglementation sur les exports de déchets plastiques. Cette nouvelle décision entrera en vigueur le 1er janvier 2021. À compter de cette date et en présence d’une difficulté à leur recyclage (contamination, mélange à d’autres déchets ou avec d’autres plastiques), ces flux seront soumis à procédure de notification avec consentement préalable de chaque pays concerné. Cette nouvelle disposition permettra d’accroître leur traçabilité et de garantir leur traitement d’une manière écologiquement rationnelle dans les pays de destination, notamment les pays tiers en voie de développement. En cas de doutes sur leur composition et leur destination, les services en charge des contrôles pourront refuser les exports depuis la France. Seuls les transferts de déchets plastiques considérés comme facilement recyclables continueront à bénéficier d’une procédure d’information (déclarative et moins contraignante).

https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-22559QE.htm