Christophe NAEGELEN

Question n°35115 – Modification unilatérale des contrats d’abonnements téléphonique

Question :

M. Christophe Naegelen attire l’attention de M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance sur la modification unilatérale des contrats d’abonnements téléphoniques induisant une hausse tarifaire et sur son acceptation tacite et présumée par le consommateur. L’article L. 224-33 du code de la consommation permet aux opérateurs télécoms de modifier les tarifs de leurs forfaits comme bon leur semble à condition d’une part de prévenir les abonnés concernés au moins un mois avant le changement de l’offre ; d’autre part de leur laisser la possibilité soit de refuser l’offre, soit de résilier leur abonnement sans frais, pendant les quatre mois suivant l’augmentation de tarif. Le texte ne précisant pas la forme que doit revêtir l’information des consommateurs, les opérateurs se contentent généralement d’un mail peu explicite que la plupart des abonnés prennent pour de la publicité. De nombreux opérateurs proposent à leur client une modification du contrat présentée sous une forme avantageuse, en cela qu’elle s’apparente à un cadeau, la modification étant offerte dans un premier temps et facturée à la hausse seulement dans un second temps. La loi ne limite pas non plus le recours à cette procédure. Résultat : les opérateurs en abusent. Force est de constater que bien souvent il s’agit d’un alignement sur le tarif d’un concurrent, en restant légèrement meilleur, de sorte que le consommateur n’ait pas intérêt à partir pour des questions financières, le tarif restant l’un des meilleurs du marché. Cela pourrait être interprété comme une forme d’entente tacite sur les prix, puisque plusieurs opérateurs adoptent cette pratique. Il conviendrait donc que les obligations prévues par l’article L. 224-33 du code de la consommation évoluent afin de proposer au consommateur, en sus des choix prévus par la loi (résiliation du contrat ou acceptation de la modification) de refuser les modifications, ce qui leur permettrait de conserver leur abonnement original. Il souhaiterait donc savoir si des réflexions sont en cours sur cette question, afin notamment de favoriser une logique d’accord explicite du consommateur à l’égard de tout changement des conditions contractuelles et, à défaut, de lui permettre de pouvoir refuser de manière plus transparente et plus aisée ces hausses tarifaires.

Réponse

L’article L. 224-33 du code de la consommation prévoit les conditions dans lesquelles un opérateur peut procéder à une modification unilatérale de contrat. Il dispose que « tout projet de modification des conditions contractuelles de fourniture d’un service de communications électroniques est communiqué par le prestataire au consommateur par écrit ou sur un autre support durable à la disposition de ce dernier au moins un mois avant son entrée en vigueur, assorti de l’information selon laquelle ce dernier peut, tant qu’il n’a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l’entrée en vigueur de la modification. (…) ». En application de cet article, le consommateur dispose donc de deux choix lorsqu’il est informé d’une modification de contrat par son opérateur. Soit il refuse la modification, dans ce cas il n’a pas d’autre option que de résilier son contrat dans les conditions fixées par l’article L. 224-33 précité. Soit il accepte la modification, dans ce cas, l’acceptation peut être tacite (si le consommateur ne fait aucune action dans le délai de quatre mois après l’entrée en vigueur de la modification) ou expresse (si le consommateur communique à l’opérateur sa volonté d’accepter la modification). La directive 2018/1972 du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen prévoit des dispositions qui ont vocation à remplacer celles de l’article L. 224-33 du code de la consommation. L’article 105.4 de cette directive dispose en effet que « les utilisateurs finaux ont le droit de résilier leur contrat sans frais supplémentaires lorsqu’il leur est notifié que le fournisseur de services de communications électroniques accessibles au public, autres que des services de communications interpersonnelles non fondés sur la numérotation, envisage de modifier les conditions contractuelles, sauf si les modifications envisagées sont exclusivement au bénéfice de l’utilisateur final, ont un caractère purement administratif et n’ont pas d’incidence négative sur l’utilisateur final ou sont directement imposées par le droit de l’Union ou le droit national. Les fournisseurs notifient aux utilisateurs finaux, au moins un mois à l’avance, tout changement des conditions contractuelles, et les informent en même temps de leur droit de résilier le contrat sans frais supplémentaires s’ils n’acceptent pas les nouvelles conditions. Le droit de résilier le contrat peut être exercé pendant un mois suivant la notification. Les États membres peuvent prolonger cette période de trois mois au maximum. Les États membres veillent à ce que la notification soit effectuée de manière claire et compréhensible, sur un support durable. » La directive 2018/1972 sera transposée en droit interne en 2021. Dans la mesure où elle est d’harmonisation maximale (article 101.1), les États-membres ne peuvent prendre de mesures plus favorables aux consommateurs que celles contenues dans la directive, sauf cas particuliers. Sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, cette nouvelle règlementation ne permettra pas non plus au consommateur de refuser une hausse tarifaire unilatérale, autrement qu’en résiliant son contrat. L’opérateur peut offrir au consommateur la possibilité de refuser les modifications et de conserver les anciennes conditions, mais il s’agit alors d’une décision purement commerciale de l’opérateur, et non d’une obligation légale. En revanche, la rédaction actuelle du texte comme celle de la directive indique que l’information relative à la modification des conditions contractuelles doit être délivrée sur un support durable. De même, la directive précise spécifiquement que la notification soit effectuée de manière claire et compréhensible. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) s’assure déjà par des contrôles réguliers que l’information des consommateurs est assurée de manière loyale dans ce secteur et en particulier que la présentation des modifications contractuelles n’est pas de nature à induire le consommateur en erreur. Elle sera particulièrement attentive, une fois la directive transposée, au strict respect de ces dispositions.

https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-35115QE.htm