Christophe NAEGELEN

Question n°3022 – Infirmier en pratique avancée en santé au travail

Question :

M. Christophe Naegelen interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur le métier d’infirmier en pratique avancée (IPA) en santé au travail. Ces dernières années, le législateur a souhaité à plusieurs reprises renforcer le rôle des infirmiers en pratique avancée. Ainsi, par exemple, dans le domaine agricole a été adoptée dans le cadre de l’article 66 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 une disposition permettant à titre expérimental pour une durée de trois ans à des infirmiers en santé au travail de réaliser des examens périodiques de suivi renforcé, des examens de reprise après congé maternité et de réaliser un bilan d’exposition aux risques professionnels. Cet article de loi prévoyait la publication d’un décret en conseil d’État pour en préciser les modalités d’application. Ce décret est finalement paru le 29 novembre 2021. Dans le même temps et dans la continuité de l’accord national interprofessionnel conclu le 10 décembre 2020 sur la santé au travail, l’article 34 de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a créé des infirmiers en pratique avancée en assistance d’un médecin du travail. Cette nouvelle disposition du code de la santé publique (article L. 4301-1) est en vigueur depuis le 31 mars 2022, conformément à l’intention du législateur. Or un décret en Conseil d’État est toujours en attente de parution. Il doit apporter des précisions sur les domaines d’intervention en pratique avancée dans le champ de la santé au travail et fixer les conditions et les règles de l’exercice de cette pratique avancée. Alors qu’il est urgent d’accélérer la création d’IPA pour pallier le manque croissant de médecins du travail, il lui demande quel est l’état d’avancement de ce décret et quelles orientations sont envisagées.

Réponse

Le manque de médecins du travail est une réalité indéniable. Depuis une quinzaine d’années, les effectifs de médecins du travail diminuent (- 15 % des effectifs en 15 ans) et les projections réalisées prévoient encore une dégradation de la démographie médicale au cours des prochaines années. Ce constat s’inscrit aussi dans un contexte plus large de tension sur la ressource médicale. Plusieurs leviers ont d’ores et déjà été mobilisés pour lutter contre la pénurie médicale au fil des dernières réformes. Les missions des services de santé au travail ont été recentrées vers les salariés qui en ont le plus besoin. C’est notamment le sens de la réforme de 2016 qui a supprimé le contrôle d’aptitude systématique et modulé la périodicité des visites en fonction des postes occupés. Par ailleurs, plusieurs dispositions de loi du 2 août 2021 ont également créé des marges de manœuvre pour permettre aux services de faire face à cette situation. Le recours aux outils de télésanté au travail : la loi crée un cadre clair pour le recours à cette pratique qui permettra de donner plus de souplesse aux services de prévention et de santé au travail (SPST) et mieux allouer la ressource médicale. Un décret a été publié le 26 avril 2022 (n° 2022-679) qui précise les modalités de recours à ces pratiques médicales et de soins à distance et garantit notamment le consentement du travailleur à la visite réalisée à distance. Le recours possible à des médecins praticiens correspondants pour les visites les plus simples dans les territoires frappés par la pénurie de médecins du travail. Le décret sur ce sujet est en cours d’élaboration.  Le renforcement du rôle des infirmiers au sein des SPST : l’article 35 de la loi a également prévu la possibilité pour le médecin du travail de déléguer, sous sa responsabilité et dans le respect du projet de service pluriannuel, certaines missions aux membres de l’équipe pluridisciplinaire disposant de la qualification nécessaire et dans le respect pour les professions concernées de leurs compétences prévues par le code de la santé publique. Des décrets importants ont été pris le 26 avril 2022 (n° 2022-679) et le 27 décembre 2022 (n° 2022-1664) pour fixer le périmètre de ces délégations et renforcer la formation des infirmiers au travail.  C’est dans ce contexte que s’inscrit l’introduction dans la loi du 2 août 2021 de la possibilité de recourir, en santé au travail à des infirmiers en pratique avancée. La loi transpose sur ce point l’accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 et fait référence à l’article L. 4301-1 du code de la santé publique dont les dispositions doivent être précisées par un décret en Conseil d’Etat.  L’article 22 de loi du 2 août 2021 mentionne effectivement la possibilité pour un infirmier en santé au travail de pratique avancée de réaliser la visite de mi-carrière. Plus largement, le recours à un auxiliaire en pratique avancée auprès d’un service de prévention et de santé au travail est également mentionné à l’article L. 4301-1 du code de la santé publique.  En l’état actuel du droit, l’article R. 4301-2 du code de la santé publique ne prévoit des pratiques avancées, ainsi que la délivrance des diplômes correspondants, que pour les domaines d’intervention suivants : pathologies chroniques stabilisées ; prévention et polypathologies courantes en soins primaires ; oncologie et hémato-oncologie ; maladie rénale chronique, dialyse, transplantation rénale ; psychiatrie et santé mentale.  Cet article devrait effectivement être complété pour donner toute son effectivité à la disposition de la loi du 2 août 2021.  A cette fin, il est nécessaire d’engager une réflexion approfondie, menée avec les professionnels concernés, pour identifier les missions et compétences qui pourraient être confiées aux Infirmiers en pratique avancée. Ce travail pourra être engagé dès le printemps 2023, en lien avec les ministères en charge de la santé et de l’enseignement supérieur. Le ministère du travail souhaite que ce chantier aboutisse d’ici la fin 2023.

https://questions.assemblee-nationale.fr/q16/16-3022QE.htm