Christophe NAEGELEN

Question n°14811 – Mauvaises pratiques des promoteurs immobiliers et achat de logements sur plan

Question :

M. Christophe Naegelen appelle l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur l’ampleur des mauvaises pratiques des promoteurs immobiliers lors de l’achat de logements sur plan, ou vente en l’état futur d’achèvement (VEFA). De très nombreux retards de livraison (près de 1 sur 3) occasionnent un préjudice financier estimé à 156 millions d’euros pour l’ensemble des consommateurs en 2017, selon une étude de l’UFC Que choisir. L’analyse des motivations des promoteurs pour justifier ceux-ci permet par ailleurs de mettre en évidence l’existence de causes exonératoires trop extensives – particulièrement concernant les intempéries – leur offrant le loisir de ne pas compenser financièrement le préjudice affectant les consommateurs. Par ailleurs, seul 1 logement sur 5 est livré sans réserve alors que pour les autres, c’est en moyenne 12 réserves qui sont émises. Pire, dans 16 % des cas, les acquéreurs signalent des problèmes nuisant tout bonnement à l’habitabilité des logements (absence d’eau ou de chauffage par exemple) ce qui permet de mettre en doute le sérieux de nombreux professionnels du secteur. Enfin, la législation actuelle autorise les promoteurs à livrer des logements ayant une surface jusqu’à 5 % plus petite que celle achetée et ce, sans aucune compensation financière. Compte tenu des prix du neuf au mètre carré le manque à gagner pour le consommateur peut rapidement augmenter : de 8 700 euros pour un studio en Île-de-France, à près de 12 000 euros pour un trois pièces en province. Alors que les litiges relatifs à la VEFA ont augmenté de 84 % sur l’année 2018, il lui demande par conséquent si le Gouvernement a l’intention de mettre en place un cadre législatif et réglementaire propre à sécuriser ce marché et à éliminer les préjudices que connaissent actuellement les consommateurs, afin de rétablir leur confiance sur ce marché en assurant leur protection.

Réponse

La vente en l’état futur d’achèvement a pour objet la vente d’un immeuble qui, au jour de la conclusion du contrat de vente, soit n’existe pas, soit est en cours de construction, et que le vendeur s’est engagé à construire ou à faire construire jusqu’à son achèvement, l’acquéreur s’engageant à verser une très grande partie du prix avant l’achèvement. Dans un souci de protection de l’acquéreur, la réglementation applicable encadre strictement les obligations contractuelles du vendeur, tout particulièrement l’obligation d’achever l’immeuble, à laquelle a été attachée la garantie financière d’achèvement. L’article R. 261-1 du code de la construction et de l’habitation précise ainsi que l’immeuble vendu en l’état futur d’achèvement est réputé achevé lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d’équipement indispensables à son utilisation, conformément à sa destination. Pour l’appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu’ils n’ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation. L’eau ou le chauffage sont autant d’éléments qui concourent à l’habitabilité de l’immeuble et leur absence rend l’immeuble impropre à toute habitabilité et toute utilisation conforme à sa destination, ce qui fait obstacle à ce que l’immeuble puisse être considéré comme achevé et justifie la mise en œuvre d’une « garantie financière d’achèvement ». Le vendeur est en effet tenu de souscrire, avant la conclusion du contrat de vente, une garantie financière d’achèvement de l’immeuble, qui permet de pallier une défaillance du vendeur et de garantir à l’acquéreur l’achèvement de la construction. Cette garantie peut être mise en œuvre par l’acquéreur en cas de défaillance financière du vendeur, caractérisée par une absence de disposition des fonds nécessaires à l’achèvement de l’immeuble. L’article 75 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Elan, a amélioré les modalités de mise en œuvre de la garantie financière due à l’acquéreur, de façon à mener la construction à son achèvement. Il s’agit notamment de permettre au garant financier, qui apporte les fonds nécessaires à l’achèvement de l’immeuble en cas de défaillance du vendeur, de demander au juge de désigner un administrateur ad hoc dont la mission est d’achever l’immeuble, lorsqu’aucun repreneur de l’opération n’a été trouvé. Cette disposition est de nature à éviter des contentieux et à permettre l’achèvement de l’immeuble dans des délais plus rapides. Enfin, une règle générale énoncée à l’article 1619 du code civil et propre à toute vente d’immeubles, et non spécifique à la vente de logements sur plan, admet une tolérance d’une différence de surface du logement de 5 % sans compensation pour l’acquéreur ; au-delà de 5 %, la différence de surface ouvre droit à diminution du prix. L’application de cette règle est d’autant plus pertinente dans la vente de logements sur plan qu’à la date de signature du contrat, l’immeuble soit n’existe pas, soit est en cours de construction. Les décrets nécessaires à l’application de la loi Elan sont en cours de rédaction. Dans ce contexte, la mise en œuvre de ces dispositions par les différents acteurs pourra être l’occasion d’une réflexion relative aux retards de livraison et permettra d’apprécier s’il convient d’envisager de nouvelles modifications du régime juridique de la vente en l’état futur d’achèvement.

https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-14811QE.htm