Christophe NAEGELEN

Question n°28269 – Autorisations d’urbanismes – ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020

Question :

M. Christophe Naegelen interroge M. le ministre de l’économie et des finances sur les conséquences de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative aux autorisations d’urbanismes prise dans le cadre de la loi d’urgence sanitaire du 23 mars 2020. Cette ordonnance prévoit la neutralisation des délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme déposées avant le 12 mars 2020 et ce jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Une telle neutralisation, de manière concrète, risque de provoquer la suspension de la quasi-totalité des autorisations d’urbanisme du 12 mars 2020 et ce, jusqu’à la fin du mois de juin 2020 au minimum. Toujours en application de ladite ordonnance, à ce délai, il faut ajouter un délai de recours supplémentaire d’une durée de deux mois pour tous les permis non purgés à la date du 12 mars 2020. En outre, cette ordonnance supprime ainsi les autorisations tacites de l’administration. Le cumul de ces dispositions aura pour conséquences de décaler considérablement les autorisations d’urbanismes et de fait, les travaux afférents. Ces mesures impacteront tous les acteurs de la filière, des agences d’architectes aux entreprises de BTP. Afin de limiter ces conséquences désastreuses, le recours au télétravail pour les différents acteurs pourrait anticiper un engorgement massif des services administratifs d’urbanisme et réduire les délais. À cette fin, il serait nécessaire d’autoriser le dépôt de demandes d’autorisation par voie dématérialisée ce qui encouragerait les instructions des demandes par les collectivités et préfectures pendant la période de confinement, dont les services d’urbanisme semblent être à l’arrêt depuis le début de la période du confinement. Aussi, il souhaiterait savoir qu’elles sont les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de réduire les conséquences calendaires de cette ordonnance. Il l’interroge sur la mise en place d’un système de télétravail permettant d’assurer la continuité minimale des études et délivrances des autorisations d’urbanismes au cours de la période de confinement.

Réponse

L’ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période a eu pour objet d’adapter, en les allongeant, de manière transversale à l’ensemble des secteurs les délais de recours, les délais de préemption de validité d’autorisation, de permis ou d’agrément ou encore les délais d’instruction des demandes formulées par les administrés auprès des administrations, mais également des administrations envers les administrés. Elle tient compte de la difficulté, pour l’ensemble des acteurs, à assurer leurs activités dans des conditions normales. Les autorisations d’urbanisme sont concernées. Par cette ordonnance, cette suspension courait du 12 mars 2020 jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire. Afin de prendre en compte spécifiquement des enjeux liés à la continuité et la reprise rapide de l’activité après la fin de la crise sanitaire, l’ordonnance no 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19 est venue apporter des aménagements et compléments aux dispositions prises par l’ordonnance no 2020-306 susmentionnée. Ainsi, sans remettre en cause l’application du principe de suspension des délais d’instruction et de délivrance des autorisations d’urbanisme, cette ordonnance a réduit d’un mois la période de la suspension des délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme en la limitant à la seule durée de l’état d’urgence sanitaire. Ces aménagements s’appliquaient de la même manière aux délais impartis aux différents acteurs consultés dans le cadre de ces procédures pour rendre leur avis ou accord. Dans la volonté de renforcer pour les professionnels et les acteurs de la filière de la construction la lisibilité du cadre juridique exceptionnel mis en place, l’ordonnance no 2020-539 du 7 mai 2020 a définitivement fixé la fin de la période de suspension au 23 mai 2020 inclus pour les délais d’instruction et de délivrance des autorisations d’urbanisme. Elle a par ailleurs précisé que les modalités prévues à l’article 12 ter s’appliquent aussi aux délais de retrait des décisions de non-opposition aux déclarations préalables ou des autorisations d’urbanisme tacites ou expresses prises en application de l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme. Les mesures de suspension des délais n’affectent toutefois pas la possibilité durant cette période, pour les autorités compétentes, de poursuivre l’instruction des demandes ou de prendre des décisions lorsque les circonstances le permettent. Collectivités et services de l’Etat s’efforcent ainsi d’assurer la continuité de leur activité, dans la mesure des moyens dont ils disposent et sans contrevenir aux consignes de sécurité tant aux pétitionnaires qu’aux personnels. Ces ordonnances no 2020-306 du 25 mars 2020, no 2020-427 du 15 avril 2020 et no 2020-539 du 7 mai 2020 aménagent également les délais encadrant les recours contentieux formés contre les autorisations d’urbanisme. Cela permet de gagner jusqu’à 3 mois de délais dans certains cas et ainsi accélérer les chantiers dans le respect du droit des tiers. Une autorisation d’urbanisme permet à son titulaire d’entamer les travaux dès sa délivrance, toutefois, certains porteurs de projet attendent l’expiration du délai de recours. L’article 12 bis de l’ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020, tel que créé par l’ordonnance no 2020-347 du 27 mars 2020 et modifié par l’ordonnance no 2020-539 du 7 mai 2020, prévoit, par dérogation aux dispositions de l’article 2 de l’ordonnance no 2020-306, que les délais applicables aux recours contentieux et aux déférés préfectoraux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir, et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils recommencent à courir à compter du 24 mai, pour la durée restant à courir le 12 mars 2020 et sans que cette durée puisse être inférieure à sept jours. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 mai est reporté jusqu’à l’achèvement de celle-ci. A la différence du mécanisme de l’article 2 initialement applicable qui prévoyait un redémarrage à zéro des délais de recours contentieux, même déjà entamés, c’est donc un système de suspension de ces délais qui s’applique, afin de permettre une relance rapide des chantiers.

https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-28269QE.htm